Paille

Son pote qui suivait une formation de coach payée par Pôle Emploi et qui était remonté comme une pendule lui avait bien expliqué, à lui, le chômeur presque looser, que quand on veut, on peut, et que n’importe quelle idée si on se remue, peut mener à la réussite, voire à la fortune !
« Tiens, je dis ce qui me passe par la tête : mettons que tu as l’idée de livrer de la paille à domicile ! Eh bien, il y a certainement des clients pour ça. En fait, il y a des clients pour tout ! Faut juste les trouver, et après tu te bouges ! C’est juste une question de volonté ! ».
L’idée, contre toute attente, l’avait marqué. Après tout il y a toujours des gens qui ont besoin de paille (animaux domestiques, décoration à Noël pour la crèche, besoin de décorations, âne dans le jardin, allez savoir…) et qui ne savent pas où en trouver, ou qui n’ont pas le temps ni dispose d’un mode de transport adapté pour aller en chercher. Or, l’avenir c’est le service personnalisé. Sur la paille il y a certainement une demande… et en face, sauf erreur, aucune offre !
Déclaré rapidement auto-entrepreneur, une annonce sur Le Bon Coin, et hop, il s’était lancé… Et, de fait, la première commande était vite tombée : une petite poignée de paille, certes, pour le hamster d’une gamine à l’autre bout de la ville, mais c’était un début (mais il allait tenter de lui placer l’abonnement hebdo en premium).
Tout en allant livrer, il songeait aux évolutions à envisager.
D’abord le tissu local, puis viser régional, et au-delà. Les investissements stratégiques à effectuer…Et un jour il n’y coupera pas, forcément : il faudra penser le marketing et la com’… Pour du développement à l’international, c’est indispensable.
Ah oui, et puis de nos jours les réseaux sociaux ! Surtout ne pas négliger les réseaux sociaux !
Et puis, quand il aura fait fortune, il pourra plaisanter en disant d’un air modeste, genre autodérision, qu’il est sur la paille.
Ah oui, putain, ça va être vraiment génial.

(2 juillet 2019)