Comment Télérama, le Vatican, Frédric Brown et Arthur C. Clarke m’ont annoncé la fin du monde

C’est l’histoire d’une association d’idées et d’un vertige : j’écoute ce midi sur France Info une interview d’Olivier Tesquet (https://www.linkedin.com/in/oliviertesquet/), journaliste tech de Télérama (*) qui réagit (c’est l’expert de service ou d’astreinte qui devait être dispo au téléphone) à l’irruption de DeepSeek, l’IA chinoise a priori game changer (jusqu’à ce que la hype médiatique retombe, je prends les paris).
Au détour d’une phrase, Olivier Tesquet explique qu’il a été en relation avec des « prélats du Vatican » très pointus qui travaillent sur l’IA. Je me dis (outre que Télérama est donc toujours très catho) : « Tiens donc, le Vatican torture les IA… ? Pourquoi ? » (car ce ne peut être seulement pour des questions purement techniques). Cela me renvoie illico à une nouvelle de SF que j’ai lue lors de mes lectures à l’âge de 13 ans (oui, ça remonte) : Les neuf milliards de noms de Dieu, publiée dans un recueil de Fredric Brown (immense auteur de « l’âge d’or » de la SF **).
La nouvelle (qui est en fait d’Arthur C. Clarke, l’auteur entre autres de « 2001, une odyssée de l’espace« ) raconte cela : « des moines bouddhistes utilisent un ordinateur pour générer toutes les permutations possibles du nom de Dieu, croyant que cela entraînera la fin de l’univers. Les informaticiens qui les assistent restent sceptiques, mais à la fin, alors qu’ils quittent le monastère, ils voient les étoiles s’éteindre une à une dans le ciel tibétain, suggérant que la prophétie des moines était vraie. » (je vous colle la nouvelle, courte, plus bas).
Alors qu’on ne cesse de prédire de façon dystopique la fin de l’humanité avec l’IA, voici comment Télérama, le Vatican, Fredric Brown et Arthur C. Clarke dans mon esprit malade m’ont confirmé l’annonce supposée de la fin du monde, puisqu’ils y ont tous travaillé ou y travaillent. La fin des temps n’arrivera pas via une routine combinatoire à la façon de celle des logiciels de craquage de mots de passe… mais par IA puisque le Vatican lui-même est sur ses gardes. C’est le sens prophétique de la nouvelle à lire ci-dessous.

(En revanche, Fredric Brown est l’auteur de “La Réponse”, The Answer, une autre courte nouvelle où des scientifiques connectent tous les ordinateurs du monde pour poser la question ultime : « Dieu existe-t-il ? ». La machine répond : « Oui, maintenant il y a un Dieu ».)

(*) je raconterai peut-être un jour comment le directeur de rédaction de Télérama de l’époque m’a dit un jour (fin 1995), les yeux dans les yeux et dans son bureau, me refusant de la place dans le magazine pour écrire sur ce qui allait nous arriver : « Aussi longtemps que Télérama existera on ne parlera pas de vos trucs d’informatique ». Mais passons. On a dit aussi jadis chez IBM à Bill Gates (je ne me compare pas, hein) qu’il n’y aurait jamais plus de 4 ou 5 ordinateurs dans le monde. Il y en a plus dans la pièce où vous lisez ce billet. Passons encore.

(**) Nouvelle parue dans Autres dieux, autres mondes, chez Denoël (1971).


La nouvelle : Les 9 milliards de noms de Dieu, d’Arthur C. Clarke

(n’oubliez pas que cela a été écrit en 1971, période
lors de laquelle l’informatique personnelle ne faisait que balbutier,
et imaginez l’impact sur un lecteur en 1971)