
[Reco médias] Youri Bezmenov (1939-1993) : ce type avait-il annoncé le merdier actuel depuis longtemps ?
C’est un podcast d’Ariel Wizman sur France Culture (épisode plutôt confus, car « trop écrit », et donc j’ai fouiné pour mieux comprendre) qui m’a fait découvrir ce Youri Bezmenov (> Wikipedia). Sans doute qu’Ariel Wizman a chopé l’info/l’idée/la tendance sur un média américain (car c’est son astuce*), à savoir The Big Think dont voici le début de l’article en anglais : « Il y a 39 ans, un transfuge du KGB a prédit de façon glaçante l’Amérique moderne. Une interview troublante donnée en 1984 par un transfuge du KGB décrit l’Amérique d’aujourd’hui et détaille quatre étapes du lavage de cerveau de masse utilisé par le KGB. ».
On se dit que, comme par exemple Edward Bernays, publicitaire auteur de Propaganda, neveu de Freud et inventeur de la manipulation de masse pas forcément connu du grand public qui a façonné et façonne encore nos vies, ce Youri Bezmenov est peut-être de ces hommes de l’ombre qui changent le monde, peut-être l’annonciateur, (ou l’auteur ?, ou l’inspirateur ?, ou le déclencheur ?) du chaos américain actuel — et par delà du nôtre : des sociétés dépressives et mortifères à bout de souffle, des réseaux sociaux toxiques et manipulateurs, des extrêmes droites et des religieux qui déferlent et étaient tapis dans l’ombre depuis la fin de la seconde guerre mondiale — accentués certes, par le terrorisme islamique (et donc l’opposition chrétienté/islam), Steve Bannon, et la révolution rétrograde conservatrice revancharde des églises évangéliques qui poussent actuellement Trump, leur idiot psycho mégalo utile accompagné de tous ses psychopathes (Musk, Vance, Thiel, Zuckerberg… — on en passe…). Bref, de la théorie de Bezmenov plus une conjonction d’événements, des causalités et des conséquences, des intérêts croisés, des enchaînements… Et nous voilà dans la plongés jusque-là, et bien profond, et pour un moment.
Ce qu’expliquait Bezmenov est ceci (extrait de Wikipédia) :
15 % seulement de l’argent communiste alloué à l’Ouest concerne le renseignement, les autres 85 % sont alloués à la subversion.
« Ce que cela signifie essentiellement, c’est : changer la perception de la réalité de chaque Américain à tel point que, malgré l’abondance d’informations, personne n’est capable de tirer des conclusions sensées dans l’intérêt de sa défense, de celle de sa famille, de sa communauté et de son pays. »
Selon Bezmenov, dans une société démocratique de nombreux mouvements s’opposent à la société : simples criminels, personnes contre la politique de l’État pour des raisons idéologiques, ennemis déclarés, personnalités psychotiques qui s’opposent à tout. Ces profils sont ceux qui vont être visés par les agents subversifs qui vont les acheter, les subvertir et les recruter afin de les faire agir dans une même direction jusqu’à ce que cette action collective mette la société en crise. Les domaines d’application de la subversion sont la religion (la détruire, la ridiculiser, la remplacer par divers sectes et cultes), l’éducation (détourner les gens d’un enseignement constructif, pragmatique et efficace), la vie sociale (remplacer des institutions et organisations traditionnelles par de la bureaucratie qui enlève aux gens toute responsabilité et initiative), la structure du pouvoir (décrédibilisation des organes de l’État comme la police), les relations de travail (grèves et parasitisme syndical), les lois et l’ordre (par l’exigence de l’égalité).
Il explique que la déstabilisation d’une société est produite en la démoralisant par l’émiettement du corps social en divers sous-groupes qui vont entrer dans un processus de radicalisation des relations sociales et lutter contre l’État ou contre d’autres sous-groupes, il désigne spécialement ceux dont les comités directeurs ne sont pas élus et qui réclament du pouvoir. Le résultat de la crise finale est soit la guerre civile, soit l’invasion étrangère, citant respectivement le Liban, l’Afghanistan et le Bangladesh. Après le changement de régime, « la révolution mange ses enfants » c’est-à-dire que les nouveaux dirigeants n’ont plus besoin de révolutionnaires et d’agitation, les agitateurs sont donc éliminés.
Pour Bezmenov il faut environ 15 ans pour que l’action démoralisatrice change le cours d’un pays, c’est le temps qu’il faut pour retourner une génération d’étudiants, sans interférence des valeurs patriotiques traditionnelles. Il rejoint dans son analyse de la subversion une dissidente du Parti communiste des États-Unis d’Amérique des années 1940, Bella Dodd.
Selon Paul Ratner, journaliste pour le site internet Big Think, la similarité de la société subvertie décrite par Bezmenov avec celle des États-Unis du début du XXIe siècle est frappante : « une société de tribus polarisées, certaines personnes rejetant carrément les faits au profit de récits et d’opinions. ».
[Anecdote en passant : les théories de Bezmenov sont > le plot qui ouvre le jeu Call of duty : Blacks Ops, cold war].
(*) C’est un truc soit dit en passant que j’ai appris en travaillant avec lui il y a quelques décennies — et qui m’a toujours très bien servi.